Confrontée à de nombreuses reprises à cet évènement douloureux, je partage avec vous mes réflexions à ce sujet.
Tout d’abord d‘un point de vue « pratique », lorsqu’il s’agit d’animaux de ferme, la réglementation est stricte et la gestion des cadavres n’est pas aléatoire. Il est nécessaire de s’organiser en amont pour connaître les démarches concernant l’équarrissage et intégrer les dispositions dans les protocoles sanitaires. Ce n'est pas simple à gérer donc autant le prévoir bien avant que d'y être confronté.
Ensuite, il y a la gestion émotionnelle de l’évènement pour les professionnels qui côtoient toute l’année les animaux. Au-delà de leur présence justifiée dans le cadre des activités en ferme pédagogique, les animaux sont de véritables partenaires de travail, collègues à plumes et à poils qui, un jour meurent et laissent un vide dans la vie des humains qui les chérissent quotidiennement. En ferme pédagogique, l’animal a un statut qui dépasse celui de rente. Il est animal familier-animal compagnon. Des liens puissants unissent les professionnels à leurs partenaires animaliers, et chaque départ est douloureux. Des recherches montrent « qu’au moment de la mort d’un animal familier, nous passons exactement par les mêmes étapes psychologiques que celles que nous traversons dans le cas du décès d’un proche : déni, colère, culpabilité, dépression, acceptation. » (Quand les animaux nous font du bien - Laurence Paoli). Nul besoin de culpabiliser à l’idée d’être touché par ce décès et de ressentir de la tristesse ; nous pleurons un être vivant avec lequel nous avions noué une relation particulière.
Enfin, la mort d’un animal en ferme pédagogique est un évènement partagé par un grand nombre de personnes. Au-delà de l’équipe professionnelle, il y a tous les bénéficiaires pour qui cet animal avait une place particulière dans leur histoire. C'était un confident, une altérité attentive et non jugeante.
L’animal, à quelques exceptions près, a une espérance de vie moins longue que celle de l’humain. Boris Cyrulnik dans l’article « L’animal dans l’aventure affective de l’enfant » (L’enfant et l’animal une relation singulière Boris Cyrulnik, Sandie Belair) précise que « Les histoires d’amour se terminent trop tôt », car la mort fait partie de la vie… Ce qui revient à dire que les enfants auront à découvrir, à souffrir et à surmonter le deuil d’un animal de compagnie ».
Pour certain bénéficiaire en ferme pédagogique c'est une première expérience de la mort, pour d’autre l’occasion d’évoquer et de revivre un départ passé et toujours douloureux. "La ferme pédagogique est un lieu d’éducation à la vie par la vie qui nous permet d’en aborder les grandes étapes. C’est en observant la vie des animaux que la vie humaine est évoquée : la grossesse, la naissance, la famille, la fratrie, la maladie, la vieillesse, la vie affective, la sexualité, l’amitié, le respect de l’autre…" (Un regard sur la ferme d'animation Sophie Lamidey). L’équipe pédagogique de la ferme dans le cadre de son accompagnement s'appuie alors sur ces évènements afin de mettre des mots sur le vécu et accompagner avec une posture adaptée les visiteurs sur leur chemin de vie.
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